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Léone et Gontran

 

 

 

Fin des années 50, Léone avait épousé sans chichis ni tralalas, Norbert, un homme un peu sauvage, peu causant, peu souriant, fallait bien se marier passé un certain âge

Ses deux plus jeunes frères tout justes rentrés d’Algérie, elle donna naissance au fils ainé, qui porterai le prénom du Père, avec un grand P

Quelques mois plus tard , un autre garçon voit le jour , puis une fille , puis deux , trois , quatre, cinq , six , une tous les ans , leur donne Léone  des prénoms du  moment , Martine , Isabelle , Sylvie …un pavillon sans fioritures , Norbert travaille aux chemins de fer ,  Léone continue à traire les quelques vaches du clos d’à côté

Norbert n’a qu’à qu’un seul mot d’ordre, quand il rentre de sa journée, tous les gamins doivent être couchés, on le dit un peu autoritaire

Un dernier garçon vient combler de bonheur cette grand famille, les filles sont belles, toutes habillées pareil, pas de tralala !

Milieu des seventies, Norbert tousse trop, ses gitane maïs l’ont affaibli, peu de répit, quelques semaines d’hôpital et direction le cimetière, c’est triste …

Léone trouve du réconfort auprès de Gontran, un homme très laid, un peu mauvais, père de 7 enfants

Le jour de la huitaine de Norbert, il a un petit coup dans le nez et le drame l’attend dans un virage, sa femme perd la vie, laissant une nichée de gosses dont le dernier a à peine deux ans

Ni une, ni deux, les voilà ensemble, une idylle prématurée dirait on, mais rien à faire des ragots, Gontran rapplique chez Léone et les voilà 18 dans la maisonnée, la belle affaire !

Faut vite que ça dégage, que ça travaille, la veuve joyeuse sait prendre un air dramatique dans toutes circonstances, elle aime se faire plaindre et  passer pour une Mère courage

La famille se reparti les gamins durant l’été, mes parents accueillent un des filles, mais au bout de quelques semaines personne ne se manifeste pour venir la rechercher, mon père décrète «  ce sera le dernier coup ! »

Les filles cherchent un jules sitôt leur 15 ans sonnés, à la St Clair, à la Ste Anne, ou à la St Denis, défilent en robe poussiéreuse sur le char de Miss, tombent dans les bras du premier qui passe, et filent travailler comme filles au pair, chez des commerçants, des notables, faut que ça dégage !

Les deux fratries ne cohabitent pas, mais donnent illusion, pas d’études, pas de vrai métier pour les pauvres adolescentes qui  retiennent comme elles peuvent leurs larmes, rêvant d’un avenir meilleur, prisonnières d’une mère comédienne dans l’âme et d’un père tyran et alcoolo

La misère !

Et moi , je suis une enfant et je vois tout , faut pas me refaire le film , je vois le manège et je me débats , je ne veux pas rentrer dans cette ronde là , faut pas me le faire , je ne dis rien , j’ai compris que je devrait patienter , je dirai les choses le moment venu , ça fera quelques étincelles , un jour je serai grande et faudra pas me chercher dans cette mascarade pathétique , faudra pas ..

J’ai revu Léone le jour des obsèques de la Mère, ce fut la dernière fois, il y a …15 ans

Gontran est parti au cimetière, que sont devenues les filles, ont-elles enfin une vie heureuse, ont-elles épongé leurs manque d’affection, leurs chagrins ?

Les parents trop permissifs, un peu déboussolés, sont accablés de tous les torts, qui aurai voulu de cette vie de merde, pas d’assistantes sociales, pas psy, les maux étaient écrasés dans le gravier humide de la maisonnée, fallait grandir avec ça, vaille que vaille …

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Commentaires

  • 18 enfants à eux deux, quelle cata ! Un lointain cousin qui en avait eu autant que ça, avait coutume de se vanter qu'il avait une fortune dans sa braguette. Pfff ! Quelle misère !

  • Une famille du village en avait eu 14 ,c'était pas si rare à l'époque
    La contraception a été véritablement adoptée dans les années 80 , quoiqu'on en dise , dans les seventies , l'influence de la religion était encore très présente , manque de communication , Léone n'avait pas lu Simone de Beauvoir
    la libération de la femme a tardé , je l'ai observé
    Je repense à cette mère de famille , morte si jeune , laissant 7 enfants ..ils ont peut être échappé à un placement , une famille d’accueil , au moins , ils sont restés ensemble , c'est peut être la seule chose qui les a fait tenir

    Je revois leurs visages , cette soumission , à 14 ans ils étaient déjà presque adultes , fallait bien ..

  • Les catho devaient être contents!! Quelle honte et quelle misère! Zola, sort de ce billet !!!
    Bon, j'espère que tu ne vas pas nous plomber l'ambiance pour la fin de l'année !!! ;)

  • honte , pas vraiment ,y'avait pas de maltraitance , ni violence , juste une drôle de famille
    cela provoquait une sorte de compassion difficile à accepter
    les grands s'occupaient des petits , ils faisaient illusion d'une famille unie
    à chaque réveillon de Noël , ça finissait mal .. quelques verres dans les nez , les " rapportés " se lâchaient
    plutôt une nouvelle de Maupassant , brr ...Triste sort

    Tu veux que je publie des émoticones qui clignotent pour mettre de l'ambiance ? je peux hein ?

  • brrrr on se croirait du temps de la terre de Zola finalement les mentalités évoluent vraiment lentement! je suis persuadée de dans nos campagnes très reculées il y a encore des familles comme cela!

  • Pas dans les campagnes , surtout dans les villes , dans certains quartiers où s'entassent des familles dans des logements insalubres ou des taudis loués par des proprio peu scrupuleux
    eux au moins , avaient de l'espace , des oncles et tantes qui les protégeaient aussi
    Léone a été enceinte pendant 10 ans de sa vie , tu te rends compte ? quelle santé !

  • 10 ans! donc au moins 20 ans de couches et d'allaitement!! Mais quelle horreur! sans compter qu'il y a peut être eu entre deux, fausse couche ou aiguille à tricoter!

  • les mères n'allaitaient plus dans les années 60 70 c'était fortement déconseillé
    du lait de vache et zou !
    elle avait un enfant tous les ans , deux dans les bonnes années !
    les gens disaient " c'est beau , ils sont tous normaux ! "
    comme quoi ..
    peu de couches , les nourrissons passaient une partie de leurs journée sur le pot , faut remonter dans le temps pour voir que ..y'a du mieux , y'a du mieux , contrairement à ce que certains voudraient nous faire croire

  • C'est qui pour toi, Leone? Une lointaine cousine?
    Heureusement que tu as échappé a cette fatalité!
    Les moyens de contraception ont quand même permis d'éviter ces sombres drames de la fertilité irréfléchie...quand on fait les enfants a la chaîne, ils deviennent vite des maillons. Et l'amour n'a plus grand chose a y voir.
    Bises ma Jeanne.

  • Léone est la soeur ainée de mon père , donc ma tante
    Toute la smala c'était mes cousins , cousines
    des heures , des journées passées avec eux , par la force des choses , jusqu'au jour ou j'ai dit "stop " , fini , sans moi !
    j'étouffais dans ce monde là , je voyais tout , j'ai réussi en partie à détacher mon père de toute pitié et culpabilité
    il a du affronter cette femme pour placer ma grand mère en pension de famille
    trop de cruauté , trop d'hypocrisie
    elle avait certainement eu une enfance difficile , mais elle était tyrannique , sans scrupules
    et excellent comédienne , fallait voir !

    bises Célestine

  • j'ai connu une famille de 23 enfants, les filles avaient des bleus en permanence, ils vivaient tous dans une toute petite maison (un baraquement construit pendant la guerre après les bombardements) la misère la plus totale, dormaient dans du papier journal , avaient des poux....bref, quelle chance d'avoir des draps et des couvertures !

    pourquoi penses tu à Léone ?

  • 23 c'est surréaliste
    dans chaque village , il y a avait les " miséreux " , on s’apitoyait sur leur sort mais ils restaient dans leur bourbier

    ces familles là ont contribué aujourd'hui a une sorte de retrait face à la maltraitance et aux négligences lourdes
    sujet encore tabou , peu de voisins donnent l'alerte , ça renvoie plein de choses de cette histoire passée
    les temps en ont changé , les services sociaux peuvent apporter une aide , ponctuelle

    je repense à cette tante tous les 1 er de l'An , nous devions aller chez eux pour souhaiter la bonne année , ça n'en finissait pas !
    y'avait des gamins partout , ça me donnait le tournis

    moi , je voulais regarder Disney parade tranquille ;)
    voir tous ces gamins sans leur maman , c'était dramatique ...
    Bises ma bretonne

  • Que dire ! 18 à la maison... les difficultés au quotidien devaient bien laissées des traces à ces enfants, sans amour des leurs, et qui n'avaient rien demandé ! Comment ont-ils organisé, une fois adulte, leur vie à eux : subie ou choisie...cela dépend certainement de son caractère et des rencontres. Famille nombreuse ne veut pas dire heureuse...il faut trouver sa place ! Bises à Jeanne, qui a elle bien trouvé sa place.

  • je ne sais pas trop comment ils ont composé avec cette enfance là
    ça fait des lustres que je n'ai pas revu mes cousins , cousines
    ma tante est venue a la messe de notre mariage et à commencé en engueuler ma soeur , parce qu'elle n'était pas invitée , mais elle n'a pas osé m'affronter , évidemment

    tu comprends que les cousinades chez nous , c'est pas désiré
    et encore , y'a eu beaucoup pire
    la soeur de Léone avait défoncé sa porte d'entrée à coup de hache un jour de grande colère
    ça rigole pas !
    j'ai hérité de l'amour inconditionnel de mes grand parents maternels , j'ai tout gardé au chaud

  • Je n'ai pas eu le temps de lire correctement ce billet, la photographie me plaît alors je le signale, je me revois tenter d'ouvrir un semblant de barrîre branlante et me coincer un doigt dans une chaîne incisive.

    Bleck

  • ça c'est une installation de mon père !
    la chaine au piquet de bois tout vert , des installations de bric et broc qui résistent au temps
    je n'ai pas réussi à photographier les poules , elles remuent tout le temps
    Bleck tu pourras relire , avec les réponses aux commentaires , après les fêtes ,tu sais bien les fêtes ..

  • C'est triste. Et c'est difficile de se construire dans une telle ambiance familiale. Le plus difficile à supporter étant, selon moi, l'autoritarisme et alcoolisme des chefs de famille. J'ai eu des copines de classe qui ne nous rejoignaient jamais dans la rue pour jouer après l'école. Elles avaient des tâches à effectuer et vivaient dans la crainte du père et par la suite la crainte des frères et sœurs aînés. Même toute jeune, on se rend compte de la misère morale de certaines de nos camarades de classe. Enfin, moi je m'en souviens.

  • oui , ça saute aux yeux

    y'en a encore qui vivent ça
    et les mariages forcés , ça existe encore , sujet tabou ..
    Je sais d'où je viens , et où je vais

  • Les contes et nouvelles de Maupassant à Bricqueboscq ...

  • gontran est decede il a legue touts ses biens a madame.Ses enfants n'ont plus rien.Apparement une bonne petite fortune

  • Bah dis donc... J'ai pas de commentaires à faire... "Pas glop" résume ce que je pourrais dire en noircissant des pages... :-(

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