Maggie m’avait conseillé d’aller consulter les annonces sur le site de particuliers à particuliers pour la recherche d’un appartement
C’est ce que je fis juste après l’avoir quittée ce jour là et je tombais sur une offre, fraichement posée
Le logement était bien situé, assez spacieux, et visiblement bien chauffé, un peu cher quand même
Ni une ni deux, je téléphone à la propriétaire, qui me met en relation avec une dame qui était missionnée pour faire la visite
Et le lendemain matin, sans tarder, nous voilà partis, Ellen et sa grande copine Pétronille, (les deux coloc,) Théodore et Solène
Dans la voiture noire de ministre, Jacqueline, et sa voix douce, (GPS) nous menait jusqu’au lieu de rendez vous, situé à deux pas de la grande Ecole
A deux pâtées maison de là, on se retrouve devant une maison fermée, avec une petite plaque, le nom d’un agent immobilier
Je sonne, et …… une vieille dame au triple menton à l’allure d’Agatha Christie arrive sur le perron
« Ouiiiiiiiiiiii, ah entrez, c’est pour la visite, très bien « dit-elle d’une voix un peu poussiéreuse
Elle nous fait entrer dans un bureau dont la déco était digne d’un polar des années 60, et là, un petit monsieur chauve prend le relais
« Allons y, les demoiselles vont être bien et la résidence est sûre «
Le vieux monsieur portait un costume clair, des bretelles, et une cravate large en canevas, il n’avait pas loin de 70 ans, peut être plus et visiblement, l’heure de la retraite n’avait pas sonné
Nous voilà donc dans l’escalier en bois d’un vieil immeuble de ce quartier huppé de la ville, et le brave homme ouvre la porte
L’appartement est très lumineux, spacieux, et surtout, à deux pas de l’Ecole, les filles bondissent et trépignent
On ne met pas de temps à se concerter, on le prend !
Dans la cour, il y a même un beau palmier
« Alors c’est parfait, allons préparer le bail «
Nous redescendons dans l’agence et le pépère appelle
« Jacquelinnnnnnnnnnnnnnnnnnnnnnnnnnnnnnne ! »
Et là, on entend dans la pièce à côté, le bruit presque oublié des touches d’une machine à écrire
La vieille dame s’installe au bureau gris métallique, apporte une chaise en formica à Théodore, au dessus d’elle un canevas encadré, à sa droite, un vieux fax et un Minitel tout ça dans un décor plus que vintage, papier peint à médaillons et lustres laiton et verre
Le décor est planté, on fait un bon en arrière dans le temps de 40 ans
Et au lieu de nous donner des formulaires à remplir, Jacqueline prend son renseignement sur un vieil agenda
Et là ….. Ça n’en finit pas
Elle nous fait répéter, épeler nos noms, adresses, employeurs …..
C’est long, on rabâche, elle corrige, on répète, elle ne comprend pas tout, on a le temps …
Je m’attends à tout moment à voir débouler dans la pièce, Hercule Poirot, Mr Parker Pyne ou Miss Marple
Ce bureau ressemble à un bureau de détective privé, nous n’osons pas croiser nos regards pour éviter le fou rire, et devinons les pensées de nos filles
Vers midi, le but est atteint, Jacqueline nous dit avec certitude
« Très bien, voilà, vous recevrez le bail dans quelques jours «
Ils nous accordent de prendre les clés en septembre, et ne demandent ni frais, ni justificatifs, on se fait confiance
On salue les deux héros, et soulagés, nous regagnons la voiture pour rentrer vite fait vers la Mayenne
Et là , vous imaginez bien qu’on se lance dans un déversement de rires et de commentaires , fabulant , ironisant , questionnant , imaginant la vie du couple , peut être qu’il seront très « envahissant « pour nos filles , ou au contraire , très serviable
On a grand plaisir à décrire les moindres détails de l’endroit totalement anachroniques, et surtout, ce couple tout à fait insolite et attachant
Et bien sur, en conclusion j’ai droit à un
« Là, tu vas nous en faire un billet Jeanne ! «